Avant de parler du prophète Elisée, nous devons parler de la réalité prophétique biblique et de son père spirituel : le prophète Elie.
La prophétie pourrait être comprise comme la capacité de prédire ce qui va se passer dans le futur. Il y a, documents écrits, de près de 3000 ans avant J.C. sur l’activité prophétique dans la ville-état de Mari sur les rives de l’Euphrate, à Biblos (aujourd’hui Liban), et ailleurs comme la péninsule du Sinaï.
Même dans le désert de Neghev (Israël), dans la région de Timna, nous pouvons encore voir aujourd’hui un temple où une pièce était réservée aux prêtres. Ils sont entrés là, dans des rêves nocturnes qui leur ont révélé où trouver du cuivre. Cette activité a eu lieu au VIIe siècle avant J.C. et même avant.
Aussi à Banias (Césarienne de Philippe) sur les hauteurs du Golan, de nombreux temples ont été consacrés pendant la période romaine au dieu Pan. Dans la cour d’un des temples, des chèvres ivres dansaient et les prêtres devinaient le destin des gens selon les mouvements des chèvres.
Avant que l’islam ne soit connu, les Arabes ont parlé de la réalité des « génies ». Une sorte de créatures invisibles capables de communiquer avec les humains et de partager avec eux leurs extraordinaires capacités d’éloquence, de poésie, de musique, de prédiction du futur, de magie, de connaissance des pensées intérieures des gens.
La prophétie apparaît aussi dans la Bible. Nous pouvons voir dans les Saintes Écritures prophètes, voyants, voyants, magiciens et autres comme eux, tous présents dans les palais des pharaons et des rois.
Souvenons-nous de Joseph, fils de Jacob, en interprétant les rêves du pharaon en Égypte (Gen 41.) Rappelons-nous aussi, au temps de Moïse, comment le pharaon a amené en présence de Moïse, ses sages, sorciers, mages… (Ex 7,11). Le roi de Babylone Nabuchodonosor demanda au prophète Daniel de clarifier la signification de ses rêves (Dan. 4).
Selon la Bible, beaucoup de prophètes étaient présents et le temps du prophète Samuel. Il les connaissait et a approuvé leur activité. Après avoir oint le roi de Saül sur Israël, Samuel dit à Saül : « Tu viendras à Gibea… tu rencontreras un groupe de prophètes qui descendent des hauts lieux avec un instrument à cordes, un tambourin, une flûte et une harpe devant eux, et ils prophétisent ». Alors : « L’Esprit du Seigneur viendra sur toi et tu prophétiseras avec eux et tu deviendras un autre homme » (1Sam 10,5).
Pendant la période d’Elie, nous avons observé une nette distinction entre les prophètes du Dieu d’Israël et les prophètes d’autres dieux. Élie est féroce contre les prophètes de Baal et les a tués dans le torrent Kishon près du mont Carmel (1Re 18,20…).
Les prophètes de Baal ont été amenés en Israël par Jézabel, la femme d’Achab, roi d’Israël. Elle était fille du roi et grand prêtre de Tyr et de Sidon au Liban. Jézabel s’imposa à Achab et le relégua, tuant même les prophètes du Dieu d’Israël. Dieu a ordonné à Elie d’arrêter l’activité des prophètes de Baal et ainsi de protéger l’alliance divine entre Dieu et son peuple Israël.
Le prophète Elie ne s’est pas interposé lorsque les 400 prophètes d’Achab en Samarie ont poussé le roi à sa mort en prévision d’une victoire dans sa bataille contre le roi d’Aram (Syrie), Ben Haddad II en Ramot Galaad. Cette bataille fut la dernière pour Achab car il mourut de ses blessures (1Re 22).
Le fils d’Achab, Achazia est devenu roi sur Israël et tombant dans son palais en Samarie a été gravement blessé. Achazia envoie des messagers d’Élie pour consulter Baal Zebub, le dieu des Philistins à Ékron, s’il guérit de sa blessure.
Élie se lève et monte pour rencontrer les messagers du roi de Samarie pour leur dire : « Est-ce parce qu’il n’y a pas de Dieu en Israël que tu vas consulter Baal Zebub, le dieu d’Ékron ?» (2Re 1).
Les messagers retournèrent au roi Achazia. « Le roi était furieux et demanda : Pourquoi es-tu revenu ? Un homme nous a dit de revenir et de dire au roi. S’il n’y a pas de Dieu d’Israël, vous devriez demander une protection.
Le roi demanda comment était l’homme qui vous avait parlé. Ils répondirent : « Un homme à fourrure, avec une ceinture de cuir autour de sa taille ». Et le roi dit : « C’est Elie, le Tesbite » (2Re 8.) Le roi envoya des soldats pour amener Elie en sa présence. Mais Elie fit descendre le feu du ciel et 100 soldats du roi moururent.
Elie était très intransigeant, il ne tolérait rien à ceux qui adoraient d’autres dieux à la place du Dieu d’Israël. Le renouveau de l’alliance à Muhraka sur le Mont Carmel entre le Dieu d’Israël et son peuple élu reste l’acte principal dans la vie d’Elie, le prophète.
Après la mort des prophètes de Baal dans le ruisseau de Kishon, Elie a eu peur de Jézabel qui avait déjà envoyé un message à Elie en disant au prophète : “Je ferai de ta vie comme la vie de l’un d’eux pour demain” (1 Re 19).
Et ainsi commença la fuite d’Élie loin de Jézabel à la recherche d’un refuge dans les profondeurs du désert. Il est allé à Beersheba venir à la ville qui se trouve au début du désert du Neghev. Le prophète était tellement fatigué, déprimé et très triste. Assis sous un balai, il désirait la mort, et ainsi rejoindre ses ancêtres. Dieu pensait le contraire et dit à Elie : Lève-toi, mange, bois et marche sur le chemin. Et Elie est allé de plus en plus dans le désert et après 40 jours, il est arrivé à la montagne de Dieu, Horeb (Sinaï).
Comme il était à l’intérieur d’une grotte, Dieu passa, accompagné d’une brise douce et Elie sortit de la grotte et se leva dehors. Alors la voix de Dieu résonna clairement dans la solitude du désert : Que fais-tu ici Elie ? Dieu lui demanda. Et Élie répondit : «JE BRÛLE DE ZÈLE POUR L’ÉTERNEL DIEU DES ARMÉES, PARCE QUE LES ENFANTS D’ISRAËL ONT ABANDONNÉ TON ALLIANCE, ONT ABATTU TES AUTELS, ET ONT TUÉ TES PROPHÈTES PAR L’ÉPÉE. Et ils cherchent à prendre ma vie » (2Re 19,14).
Comme pour vous aujourd’hui, les premières paroles de la réponse d’Elie à Dieu sont devenues la « devise » de l’Ordre Carmel jusqu’à aujourd’hui. Ces quelques mots regroupent les idéaux de l’Ordre Carmel. Dieu dit à Élie : « Retourne au désert de Damas, et quand tu arriveras, oint Hazaël comme roi sur la Syrie. Tu oindras aussi Jéhu, fils de Mimshi, roi d’Israël, et Élisée, fils de Safat d’Abel Mehola, tu oindras comme prophète à ta place.
Alors Elie revint par le désert jusqu’à ce qu’il atteigne Abel Mehola dans la vallée du Jourdain. Là, il trouva Élisée en train de labourer douze paires de bœufs. Alors Elie passa à côté de lui et jeta son manteau sur lui (1ère 19,20). Élisée quitta tout et suivit Élie et devint son serviteur jusqu’à ce qu’Élie fût emmené au ciel. (2Re 2).
Nous pourrions discuter de quelques affaires lors de ce dernier voyage d’Elisée avec Elisée. Premièrement, l’insistance d’Elie à demander à Élisée de le laisser tranquille et le refus absolu d’Élisée d’abandonner son maître. Ensuite, il y a les soi-disant fils des prophètes qui demandent à plusieurs reprises à Elisée s’il sait que son maître va au ciel aujourd’hui.
Élie, accompagné d’Élisée, marcha ensemble de Guilgal à Béthel, et de Béthel à Jéricho. Quand ils arrivèrent à Jéricho, ils s’approchèrent du Jourdain. Elie a arrêté le courant de la rivière, et les deux traversent la rive orientale. Puis, alors qu’il marchait, Elie fut soudainement emmené au ciel.
Elisée avait demandé à Élie de lui laisser une part de son esprit. Sa requête était difficile, mais il eut réponse : le manteau d’Elie est tombé sur le sol quand le prophète a été emmené au Ciel. Et en le prenant, Elisée a reçu l’esprit de son père spirituel. Depuis ce jour, l’esprit d’Élie doit accompagner Élisée dans son activité prophétique. En fait, Elisée en utilisant le manteau d’Elie a été en mesure de passer à travers la rivière sur la rive ouest.
Quand il est arrivé à Jéricho, les gens ont demandé à Elisée de guérir l’eau de la ville qui était contaminée. Elisée alla à la Source, jeta du sel et l’eau fut purifiée.
De Jéricho Elisée a pris l’ancien chemin biblique, il a été utilisé par Josué des années plus tôt. Il a marché depuis le pied de la montagne connue aujourd’hui comme la montagne des tentations de notre Seigneur Jésus Christ, jusqu’à Béthel.
Avant d’arriver à Béthel, le prophète escaladait une route très raide et quelques jeunes de la ville ont commencé à se moquer d’Elisée, en disant qu’il était chauve. Elisée, en colère, ordonna à deux ours de sortir des bois et de les dévorer. De Béthel, il se rendit au mont Carmel et du mont Carmel à Samarie, capitale du royaume d’Israël.
Il y a quelques caractéristiques dans Elisée qui diffèrent de ceux trouvés dans Elie. Par exemple, Elie était un homme qui vivait dans des espaces ouverts ; Elisée, cependant, fréquentait beaucoup plus la ville, en particulier Samarie capitale du Royaume d’Israël et non pas seulement.
Élie était plutôt un homme solitaire, un homme du désert selon sa façon de vivre et les vêtements qu’il portait. Élisée n’était pas comme ça. Il était souvent accompagné des soi-disant fils des prophètes, partageant parfois avec les anciens de Samarie dans leur maison, familiers avec les rois d’Israël, de Juda, voire de Damas. Il rendait régulièrement visite à une famille à Shunem, dans la plaine d’Esdrelon, et allait avec son serviteur tout le temps.
Par exemple, quand Moab s’est rebellé contre Israël après la mort d’Achab, le roi d’Israël Joram a demandé à Elisée sur l’opportunité d’attaquer Moab avec le roi de Juda Josaphat. Elisée fut très dur avec le roi d’Israël en lui disant : « Si je ne considère pas la présence de Josaphat, roi de Juda, je ne te regarderais pas, je ne te verrais pas » (2Re 3,14).
Puis, Elisée demanda un musicien et quand le musicien toucha la main du Seigneur, il alla vers Elisée pour lui dire que le Seigneur livrera les Moabites entre les mains d’Israël et Juda. Il convient de noter que l’utilisation d’instruments de musique était une pratique très courante chez les enfants de prophètes lors de leurs rituels religieux.
Elisée rendit régulièrement visite à Shunem et la Sunamite lui fit préparer une chambre à l’étage de sa maison. Elisée apprécia la gentillesse de la femme et lui prédit la naissance de son premier enfant.
Quand le fils grandit, il travaillait un jour avec son père dans les champs de la plaine d’Esdrelon et il est devenu très malade. Il a probablement passé trop de temps au soleil et pris un coup de soleil. Peu après, le seul enfant de la famille est mort.
La Sunamite vint en hâte au Mont Carmel et demanda à Elisée de l’accompagner jusqu’à sa maison à Shunem. Elisée hocha la tête et vint à Shunem. Quant à la maison, il monta les escaliers parce que sa mère avait placé son fils mort dans le lit du prophète. Le prophète souffla de l’air dans la bouche de l’enfant quelques fois jusqu’à ce que l’enfant revienne à la vie.
À un moment donné, alors qu’elle se trouvait à Gilgal, Elisée mangeait avec les enfants des prophètes et quelque chose n’allait pas avec la nourriture. L’un des fils des prophètes s’exclama : homme de Dieu, il y a la mort dans le pot. Elisée a commandé de la farine, l’a mise dans le pot et la nourriture est devenue saine.
En ce qui concerne la relation entre Élisée et le roi d’Israël, nous rappelons ici la guérison de Naaman, le commandant militaire du roi de Damas. Quand il fut envoyé par le roi de Damas Ben Haddad II, demandant au roi d’Israël Joram de trouver une solution à la lèpre de Naaman, le roi craignait que ce soit un prétexte pour que le roi de Damas lui déclare la guerre. Le prophète Élisée a apaisé ses peurs et l’a guéri de la lèpre.
Elisée partit pour Damas. Le roi de Syrie Ben Haddad II était malade. On lui assura que l’homme de Dieu d’Israël était venu à Damas. Ben Haddad a dit à Hazaël d’apporter beaucoup de cadeaux et de demander au prophète s’il se remettrait de cette condition.
Hazaël fit la volonté de son roi et demanda au prophète ce qu’il advient de la maladie du roi. Elisée dit à Hazaël : « Va et dis-lui : tu guériras certainement ». Cependant, le Seigneur m’a montré qu’il mourra vraiment ” (2Re 8,10). Elisée dit à Hazaël : Le Seigneur m’a montré que tu deviendras roi de Syrie, et puis, en regardant très triste, il dit : Tu seras très cruel envers mon peuple, le peuple d’Israël.
Hazaël quitta Elisée et alla dire au roi Haddad II : Elisée m’a dit que vous vous en remettriez sûrement. Mais le lendemain, Hazaël prit une toile épaisse et la plongea dans l’eau, et l’étendit sur son visage pour qu’il meure ; et Hazaël régna à sa place.
Et ainsi Elisée fit une des trois choses que Dieu ordonna à Elie de faire quand il était sur le mont Horeb : oindre Hazaël roi sur la Syrie.
Puis Élisée retourna en Israël et appela l’un des fils des prophètes, et lui dit : « Prépare-toi, prends cette fiole d’huile dans ta main, et va à Ramot de Galaad » (2Re 9,1). Le fils des prophètes se rendit à Ramot Galaad. Là, il trouva Yehu en pleine bataille contre Hazaël, le nouveau roi sur la Syrie. Le fils des prophètes appelle Yehu en dehors des autres chefs militaires et l’oint roi sur Israël. Jehoram le roi d’Israël était en ce moment en train de récupérer en Samarie des blessures qu’il a reçues dans la bataille contre Hazaël à Ramot Gilead.
Jéhu a tué tous les descendants d’Achab dans le royaume d’Israël. Jézabel fut jetée par la fenêtre par ses eunuques dans les champs de Naboth, et dévorée par un groupe de chiens sauvages. Ainsi s’accomplit la prophétie d’Élie sur la fin de la dynastie d’Achab et la mort cruelle de Jézabel. Les prophètes Elie et Elisée sont tous deux très liés à l’Ordre du Carmel, spécialement ici sur le Mont Carmel. Mais pas seulement les Carmes. Les deux prophètes sont vénérés par les juifs, les musulmans et les druzes ici sur le Mont Carmel et dans d’autres endroits du pays aussi. Les traditions relatives à ces deux prophètes sont nombreuses et très riches dans les trois religions : judaïsme, christianisme et islam. L’esprit de ces deux grands prophètes est encore vivant de nos jours ici à Haïfa.
Fr. Francisco Negral Ramos, ocd
